Chasses Internationales, Les Ateliers BdM, au nom du bois et de la Foi
Janv, fev, mars 2023
Forêt domaniale de Rambouillet, Auffargis dans les Yvelines. Le temps est à la pluie d’octobre. Un pinson des arbres donne un récital en lisière de forêt. Je pénètre dans Les Ateliers BdM. Un nuancier d’essences de bois m’embrasse, sans m’étreindre. La porte se ferme, Bruno de Maistre m’attend tout à côté de son Bureau lyrique, un défi esthétique et technique, en charme et en chêne, habillé d’un tissu Pierre Frey, présenté au Salon Révélations à Paris en 2017. Un café et nous nous isolons dans la seconde partie de l’atelier près du poêle qui vibre déjà à cette époque de l’année. Il faut faire barrage aux effets de l’humidité sur les colles et les vernis. Le fondateur des Ateliers, cheveux ayant livré bataille, fort en épaules, basket au pied et pantalon jean, aisance sportive innée répond sans ambiguïté, avec beaucoup de disponibilité et d’honnêteté vis-à-vis de lui-même. D’une famille de chasseurs proche de l’équipage de Champ-chevrier et à tir, non pratiquant lui-même mais très clair sur le sujet, il compare les attaques qui touchent la chasse aux tombereaux d’insultes qu’essuient les bûcherons quand ils procèdent à une coupe en forêt.
Idéologie contre connaissance. Lui a commencé par une école d’art, de dessin, Penninghen. Il y a appris la communication visuelle et à pro- mouvoir les valeurs d’une marque. Un engagement dans l’équipe de communication d’un candidat à l’élection présidentielle de 2007 puis il prend la voie du numérique toujours dans la publicité. Déjà : « Je percevais que quelque chose me manquait. Je me perdais en chemin, j’étais loin de mes valeurs. » Néanmoins il poursuit brillamment dans le groupe Publicis. Août 2008, black out, rien ne va plus, il arrête tout, sans savoir pourquoi. Il doit stopper.
Il part à Londres, accepte un job de technicien dans un hôtel et se soumet à un bilan psy et professionnel afin de comprendre les raisons du rejet. C’est la reconstruction. « Je voyais la City prendre la direction de ses bureaux dans le métro sur un air pas très joyeux et, de mon côté, j’allais vers mon terrain de jeu. J’ai compris alors que mes capacités intellectuelles œuvraient à plein régime quand je travaillais avec mes mains. » Le retour à Paris est plus enjoué mais, marié, papa, il doit aviver le nouveau souffle venu de Londres. En février 2009, il entre à l’École Boulle et se spécialise dans le bois, de nature complexe, vivante et élaborée. Premier jour, premières sensations, tout fonctionne: le goût, l’envie, l’intellect, la main et tout à l’unisson. Au bout de deux années de formation, de stages dans de belles maisons, c’est l’heure du grand bain. « En cherchant, j’ai trouvé plus de clients qu’un patron. Au début, j’ai réalisé des choses simples, cuisines, placards… Très rapidement, j’ai travaillé sur le mobilier d’une église. J’ai remporté le prix de la création du Rotary Club. Puis une seconde paroisse m’a sollicité. La reconnaissance est arrivée très rapidement. Le bouche-à-oreille a suivi. Les projets étaient de plus en plus intéressants. » Les Ateliers BdM prennent leur envol en 2011, il retrouve ses sensations d’entrepreneur mais il n’oubliera pas que tout se construit avec l’autre, avec les autres. Son épouse Laure l’a rejoint, la maison a fait des petits: d’Arimathie, dévolu au mobilier liturgique; Immersion au cœur de la main, destiné aux particuliers et aux entreprises; et Daphné, dédiée aux objets réalisés à partir de chutes de bois.
Nous reprenons notre entretien pas très loin d’ici, à la Faisanderie du château de Rambouillet dans un environnement rénover aux murs habillés de bois. « Cécile de Saint Venant de Chambord m’a proposé en 2021 de mettre nos savoirs au service de Guillaume Trouvé, directeur des bâtiments et des jardins et architecte du patrimoine au Domaine et Maxime Castello, responsable du patrimoine bâti. Nous avons réaménagé le salon de chasse et le débotté de la Faisanderie avec eux. » Bureau, malle, table de réunion, de jeux, de chevet, écritoire, aménagement, parquet, mobilier et sculpture liturgique, créations sublimes (la lampe Envol, le module Papillon, le bureau Lyrique…)…
Bruno de Maistre se définit plus architecte mobilier qu’ébéniste, la tête et les mains. Nous poursuivons notre discussion sur l’intelligence collective, la sérendipité – qui se nourrit de tous les incidents rencontrés au cours d’un projet –, la relation primordiale avec ses clients, sa foi profonde. « Je me sens aujourd’hui extrêmement libre », me sourit-il. Laure et Bruno, entouré de leur équipe, ne conceptualisent pas la vie, non, il la dessine dans et pour l’unité. »
Formé en école d’art (Penninghen) puis en agence de communication, Bruno de Maistre a acquis les mécanismes de la créativité, un esprit de disruption et une capacité à s’appuyer sur sa curiosité sans limite pour nourrir son imagination. C’est ensuite à l’école Boulle qu’il a appris les techniques, les gestes et les réflexes lui permettant d’appliquer la recherche conceptuelle à la matière. En parallèle, il a suivi une licence d’Arts Sacré à l’ICP. Ces trois compétences sont les moteurs du travail des Ateliers BdM dont il est le fondateur depuis 2011.
